EN CONSTRUCTION
Le milieu - Les ressources - Les habitants
Il
s'agit ici de la reproduction d'un ouvrage ayant pour thème "La
Lorraine " par Émile GORÉ Instituteur. Cet ouvrage aborde
les sujets suivants : le milieu, les ressources et les habitants de la Lorraine
en 1914. Cet livret comporte une préface de M. Charles DESSEZ Inspecteur
d'Académie de Meurthe-et-Moselle.
Cette brochure a été éditée sous forme d'un "manuel"
de géographie et lectures lorraines par la Librairie Sidot Frères
V. VAGNER & J. LAMBERT, Neveux, Successeurs - 3, rue Raugraff - NANCY -
1914
Cher MONSIEUR GORÉ,
Je
suis heureux de saluer la seconde édition de votre petit livre. Que la
première ait été si vite épuisée, c'est la
meilleure preuve qu'un de mes plus chers désirs est accompli : en Lorraine,
aujourd'hui - dans nos écoles primaires, tout au moins - on enseigne
la Lorraine.
Il est vrai que nous avons été puissamment aidés par les
circonstances. Quelques mois après l'apparition de votre ouvrage, là
Chambre des Députés tout entièré émettait
le vœu que l'Histoire et la Géographie locales eussent désormais
leur place dans notre enseignement et, moins d'une année ensuite, la
très belle circulaire signée Maurice Faure prescrivait et sanctionnait
ce que la Chambre avait demandé. Notre tentative n'avait pas seulement
pour elle le bon sens, la logique - ce qui est déjà quelque chose
- elle avait aussi l'appui de l'opinion publique et de l'autorité ministérielle
; et voilà pourquoi, sans doute, elle a si bien réussi. Avec vous,
tous vos collègues se sont engagés résolument dans une
voie qu'ils savaient officiellement reconnue et approuvée.
Ils y persévèreront, j'en suis sûr.
A enseigner, et d'abord à découvrir leur pays, son passé
si glorieux et son présent si riche d'activités fécondes,
ils ne manqueront pas d'éprouver, avec cette satisfaction que donne au
bon ouvrier la besogne bien faite, une jouissance plus délicate, une
fierté qui les paiera largement de leurs efforts.
Les uns continueront à préparer et à écrire ces
monographiès communales dont nous avons déjà vu tant d'intéressants
spécimens ; les autres, ayant peu de loisirs à consacrer aux recherches
personnelles, étudieront, du moins, et utiliseront les beaux travaux
dont la Lorraine a été, de nos jours, le sujet, Et aucun ne craindra
qu'en développant dans les cœurs de ses élèves l'amour
de la petite patrie, il puisse jamais faire tort au culte de la grande :
plus nos enfants aimeront leur Lorraine, et plus aussi, vous le savez, ils aimeront
la France.
Charles DESSEZ, Inspecteur d'Académie.
Pourquoi
l'étude de la Lorraine et pas celle du département ? Simplement
pour une raison pédagogique. Fait de pièces et de morceaux, taillé
à la convenance des politiciens, le département est un cadre administratif,
non une individualité physique. Se cantonner dans son étude, c'est
détruire les rapports naturels des choses, se mettre dans l'impossibilité
d'expliquer les phénomènes géographiques, se résigner..
à ne pas montrer leur corrélation et leur enchainement. Comment,
en effet, donner une idée du relief de la Meurthe-et-Moselle sans parler
des eaux vosgiennes qui l'ont modelé ? Expliquer le régime de
la Moselle sans remonter à son cours supérieur ? Faire comprendre
notre première ligne de défense sans l'étudier dans son
ensemble, dans les forteresses du département de la Meuse comme dans
celles des Vosges ? Et nos grandes divisions administratives, cours d'appel,
corps d'armée, académie, ne sont-elles pas interdé-partementales
? Pourquoi les écolieirs de Commercy, de Saint-Dié ou d'Épinal
ne connaitraient-ils pas, l'Université de Nancy tout aussi bien que ceux
de Baccarat, de Longwy ou de Toul ?
Ce petit livre se divise en quatre parties : la première, consacrée
au milieu physique, retrace les actes divers du drame sans fin qui se joue à
la surface de notre terre. Des lectures simples expliquent les transformations
des Vosges, du Plateau et des cours d'eau lorrains.
La seconde est l'étude des ressources et du travail qu'elles déterminent.
Mention y est faite d'un certain nombre d'établissements industriels
choisis à titre d'exemples et sans aucun but de réclame ou d'exclusion.
Qu'on veuille bien, d'ailleurs, ne pas chercher dans ce chapitre l'énumération
de nos usines et de nos manufactures, le dénombrement de nos voies ferrées
et de leurs embranchements, la statistique complète des œuvres lorraines.
Une telle nomenclature ne tiendrait pas dans un aussi mince opuscule et ne serait
d'aucune utilité pour nos élèves. Ce que nous avons voulu
faire, c'est un tableau d'ensemble qui mette en relief la personnalité
économique de notre région, montre la multiplicité de nos
ressources, fasse admirer à nos enfants les efforts et sacrifices du
peuple lorrain. Nous y avons expliqué la répartition des produits
du sol, la localisation des.principales industries, la distribution des grands
courants commerciaux. Nous avons cherché à faire éomprendre
la dépendance étroite et réciproque de la nature et de
l'homme, à déterminer la place importante qu'occupe notre province
dans le domaine économique de la France, de l'Europe et du monde. Enfin,
comme les phénomènes liés à l'activité humaine
sont lnfiniment capricieux et changeants, nous n'avons pas noté seulement
la production d'une de ces dernières années, mais nous avons montré
la rapidité des progrès accomplis depuis 1870 et laissé
entrevoir quand c'est possible ceux qui tarderont pas à se réaliser.
Dans la troisième partie, l'étude des Habitants, nous avons laissé
de côté les Arrondissements et les Cantons, les circonscriptions
électorales et ces rouages judiciaires, qui constituent peut-être
d'excellents chapitres d'instruction civique, mais dont le rôle géographiqe
est nul ou à peu près. Ici encore nous nous sommes efforcés
de montrer la liaison intime qui unit l'homme à la terre. Comme le recommandent
les directions qui accompagnent les nouveaux programmes des écoles normales,
nous avons pensé "qu'il valait mieux parler des mœurs d'un
peuple et de ses institutions que d'énumérer ses divisions administratives".
Et c'est pourquoi nous avons cherché à mettre en relief les qualités
du peuple lorrain, à rappeler quelques'unes de ses anciennes coutumes,
à montrer les principales manifestations de sa vie matérielle,
intellectuelle et morale. Enfin, comme la nature ne subit pas la loi éphémère
des traités, nous avons consacré une dernière partie à
la Lorraine annexée et à sa sœur d'infortune, l'Alsace.
Nous ne nous dissimulons pas les imperfections de ce petit manuel que nous aurions
voulu intéressant, agréable et facile à lire. Malheureusement,
certaines choses ne répondent qu'imparfaitement à ce que nous
avions rêvé. Tel qu'il est, nous le soumettons au jugement de nos
collègues et nous les prions de vouloir bien nous communiquer les critiques
et les rectifications qu'il leur suggérera. En terminant, nous avons
le devoir bien doux d'exprimer ici toute notre gratitude à M. Ch. Dessez,
Inspecteur d'Académie de Meurthe-et-Moselle, qui a bien voulu s'intéresser
à notre modeste travail et nous donner de précieux conseils; à
MM. Ern. L'Homel, Directeur de l'Ecole Didion à Nancy et Ch. Sadoul,
Directeur du Pays Lorrain et de la Revue Lorraine Illustrée, qui ont
examiné notre manuscrit et y ont fait d'utiles corrections; enfin aux
Auteurs et aux Éditeurs qui nous ont autorisé à glaner
dans leurs œuvres et dans leurs éditions les nombreux extraits qui
forment la partie la plus intéressante de ce petit livre.
E. GORÉ.
I - Le relief
La
Lorraine occupe au nord-est de la France les terres les plus hautes du bassin
de Paris. Elle comprend deux régions distinctes : le Plateau et
les Vosges.
C'est une province d'environ 40 lieues de long, du nord au sud, sur 35 de large,
de l'est à l'ouest. Sa superficie est de 22.400 km², y compris la
Lorraine annexée, ce gui représente à peu près le
24e de la France, le 446e de l'Europe, le 22.000e
du globe depuis la malheureuse guerre de 1870-71 elle a été diminuée
du quart environ de son territoire, soit 5000 km² arrachés violemment
à la France avec l'Alsace.
La Lorraine n'est donc qu'une toute petite partie de la surface de la terre.
Nous verrons cependant la belle place qu'elle tient en France et dans le monde
par sa beauté, ses richesses et le commun effort de ses habitants.
CI. Delarue.
1.
- LE PLATEAU LORRAIN
Le Plateau Lorrain domine les plaines de la Champagne, de la Saône et
du Rhin. D'une altitude moyenne de 300 mètres, il s'incline de la montagne
vers Paris.
Ses limites naturelles sont : à l'est, les Vosges et la Sarre ;
à l'ouest, les hauteurs de l'Argonne et la vallée de la Saulx ;
au nord, le massif de l'Ardenne ; au sud, les monts Faucilles que les Lorrains
appellent «La Vôge».
A l'est de la Moselle, le plateau est à peu près uni ; à
l'ouest, il est sillonné de longues rangées de côtes :
les hauteurs de la Moselle et celles de la Meuse.
Lecture
: Les transforniations du Plateau Lorrain
A l'origine, le Plateau Lorrain était beaucoup plus élevé.
Il y a des milliers d'années, d'énormes torrents descendus des
Vosges le sillonnèrent profondément, ne laissant debout que les
rocs les plus durs. Les monticules isolés qui se dressent dans notre
pays, comme la côte de Vaudémont-Sion ou les coteaux que vous connaissez,
ne sont que les ruines du plateau primitif.
Ces torrents n'entamèrent pas régulièrement la surface
du plateau. Les roches les plus tendres se creusèrent plus rapidement
que les autres. L'eau y traça d'énormes rigoles, qu'elle élargit ;
et fouilla de plus en plus. Ainsi se formèrent nos vallées actuelles.
Mais avant de déterminer leur lit, les eaux vosgiennes livrèrent
de furieux assauts aux côtes de Moselle et de Meuse, qu'elles cherchaient
à balayer. Nos collines tinrent bon. En bien des endroits, elles furent
entamées, ébréchées, déchiquetées.
Aussi les voyons-nous aujourd'hui traversées par de nombreux couloirs.
A notre époque, il n'y a plus de ces grandes batailles géologiques
entre la terre et les eaux. Cependant les pluies, les neiges, les cours d'eau,
les gelées, le soleil, la foudre, le vent, dégradent sans cesse
la surface du plateau, qui continue à s'abaisser lentement. Mais l'usure
est insensible, puisque d'après les calculs faits, l'altitude générale
des continents ne diminue guère que "d'un mètre en 4000 ans".
Aspect du Plateau Lorrain
Le relief du Plateau Lorrain est simple. A l'est, il présente de grandes
surfaces planes ou peu ondulées ; à l'ouest, c'est un pays
de collines et de coteaux. On aperçoit très bien ces deux formes
de quelque sommet des Vosges ou de quelque hauteur des environs de Nancy. Mais
le meilleur observatoire est la côte de Vaudémont-Sion dominée
par son clocher moderne et le vieux donjon qui commandait le Saintois.
Isolée de toutes parts, elle est, après les Vosges, le point culminant
de la Lorraine. On découvre au sommet un horizon immense. A l'ouest la
vue s'étend jusqu'aux côtes de Meuse, derrière lesquelles
on devine les coteaux du Barrois Au midi et à l'est, le plateau se déroule
sur une vingtaine de lieues d'étendue. S'élevant lentement jusqu'aux
Vosges, il offre l'aspect d'une plaine ondulée, avec des hauteurs isolées,
des ravins, des fonds et des rides parfois profondes que sillonnent les cours
d'eau. Les plissements du sol y sont si doux, ils affectent des courbes si molles,
que l'impression d'ensemble est celle d'un pays plat, monotone, un peu triste.
Des cultures partout. Les bois et les prairies n'y manquent pas. Mais ce qui
domine entre les cent villages que l'on aperçoit, c'est le champ de labour
qui a été longtemps l'unique ressource des habitants du plateau.
1.
- LES VOSGES
Françaises sur le versant occidental, du Donon au Ballon d'Alsace, les
Vosges sont la partie la plus pittoresque de la Lorraine. Elles dominent le
plateau, lui envoient leurs eaux et influent sur son climat.
Le Col de Saales les divise en deux sections : au sud, les Vosges granitiques,
où se trouvent les hauts sommets arrondis du Ballon de Guebwiller (1426m),
du Ballon d'Alsace, du Hohneck ; au nord, les Vosges gréseuses,
moins hautes et plus découpées, avec le Donon pour point culminant.
Le Col de Saverne livre passage par des tunnels au chemin de fer de Paris à
Strasbourg et au canal de la Marne au Rhin. La partie restée française
est traversée par des routes qui franchissent les cols élevés
de Sainte-Marie-aux- Mines, du Bonhomme, de la Schlucht, de Bussang, etc.
Les Vosges sont les montagnes les plus gracieuses de France. De belles forêts
de hêtres et de sapins les couvrent presque entièrement ;
des prairies s'allongent dans leurs vallées et, sur leurs hauts sommets,
s'étendent des pâturages appelés chaumes.
LECTURES
: Les transformations des Vosges
Les Vosges ont été formées par un des plissements de la
surface de la terre à la même époque que l'Ardenne, le Massif
Central, le Plateau de Bretagne... C'est seulement des millions d'années
après qu'un autre pli de l'écorce terrestre forma les Pyrénées,
les Alpes et le Jura.
Comment expliquer de tels phénomènes ? Une petite comparaison
vous les fera comprendre. Rappelez-vous la pomme qui sort du four toute brûlante
et toute gonflée. Lorsqu'on peut la manger, sa peau s'est plissée,
elle forme des saillies et des creux. La terre, tout d'abord, était un
globe de feu. En se refroidissant, elle a diminué de volume et son enveloppe
s'est ridée tout comme celle de la pomme. Les saillies sont les montagnes,
les creux les vallées et le fond des mers.
Jadis, les Vosges eurent des glaciers. Les moraines qui retiennent l'eau du
lac de Gérardmer furent portées à la place qu'elles occupent
par des « fleuves de glace ».
Plus élevées autrefois, elles atteignaient de 3 à 4000
mètres, c'est-à-dire l'altitude des Alpes. Mais l'action incessante
des glaciers, des torrents, des gelées, du soleil, de la pluie les a
usées, et, actuellement, nous n'en voyons plus que les ruines. Dans quelques
millions d'années, il n'en restera probablement que le pied.
Comme les montagnes plus jeunes, Alpes et Pyrénées, elles eurent
des cimes hérissées de dents, de pointes, de pics, d'aiguilles.
Mais leurs arêtes vives s'émoussèrent sous l'action des
forces qui les dégradaient et aujourd'hui leurs formes sont molles et
arrondies.
Cependant les Vosges seraient beaucoup plus basses si elles n'avaient été
surélevées. Le plissement qui produisit les Alpes s'étendit
jusqu'à elles et les redressa comme sous l'action d'un formidable coup
d'épaule. Aussi, la chaine est-elle plus haute au sud qu'au nord.
En même temps la poussée disloqua la masse, y ouvrit quantité
de fissures, dont plusieurs livrent passage aux eaux thermales, et y causa une
énorme fracture qui donna naissance à la plaine du Rhin.
C'est ainsi que les Vosges sont proches parentes de la Forêt Noire, avec
laquelle elles ne formaient, au début, qu'un massif.
Aspect
des Vosges
Avant le traité de Francfort, les Vosges étaient françaises
sur leurs deux versants, en Alsace comme en Lorraine. Elles se partagent maintenant
entre la France et l' Allemagne. Nous n'en possédons plus le point culminant,
le Ballon de Guebwiller ; mais notre Hohneck, qui lui est inférieur
de 60 mètres seulement, a plus d'importance, parce qu'il est le centre
de dispersion des eaux du massif.
Le site vosgien se présente à nous sous trois aspects : en
bas, la prairie ; sur les pentes, la forêt ; au sommet, les
chaumes. Les prairies occupent le fond des vallées, les cuvettes qui
furent jadis des lacs et la pente en dessous des forêts ; la vache
y paît dans le silence des choses, interrompu par le son argentin des
clochettes, le bruissement des ruisseaux et le grondement des usines.
Entre
les altitudes de 500 et de 1000 mètres, s'étend la forêt.
Deux essences y dominent : sur les granits des Vosges les plus anciennes,
le sapin ; sur les assises des grès, le hêtre au feuillage
moins sombre. Les sapins y dressent leurs fûts élancés,
hauts parfois de 30 et même de 40 mètres. Non moins beaux, mais
moins agités par les vents sont les hêtres des grès roses
aux roches déchiquetées, taillées en falaises, couronnées
d'antiques forteresses, dont les ruines croulent sous le lierre et les ronces.
Dans de semblables forêts, les sources jaillissent toujours et les torrents
ne tarissent jamais.
Au-dessus de 1000 mètres, parfois même de 1300, les arbres disparaissent.
On pénètre dans les Hautes-Chaumes, gazon parsemé de fleurs
minuscules, herbes fines, que de violentes rafales obligent à ramper
sur le sol.
II - Le climat
Le
climat lorrain est saint, grâce à l'altitude du pays, à
l'étendue des forêts, à l'absence d'eaux stagnantes et à
la fréquence du vent.
L'éloignement de la mer en fait un climat continental, avec des hivers
longs et froids, des étés courts et chauds et des sautes brusques
de température en toutes saisons. Il subit surtout l'influence des vents
marins du sud-ouest qui amènent la pluie, et des vents continentaux du
nord-est qui accompagnent le beau temps ou le froid. La variété
du relief le modifie sensiblement. Les collines lorraines et, en particulier,
!es montagnes des Vosges, reçoivent plus de pluies et de neiges que le
plateau ; les pentes qui regardent l'ouest sont plus humides que les versants
opposés ; les coteaux exposés au sud sont moins froids que
ceux qui s'inclinent vers le nord.
LECTURES
: La température en Lorraine
Voyez cette bizarre ligne brisée! Elle indique la marche de la température
dans le cours d'une année moyenne à Nancy. En l'observant attentivement,
nous aurons une première idée du climat lorrain.
En janvier, le mois le plus froid de l'année, la température moyenne
de chaque jour oscille aux environs de 0°. En juillet le mois le plus chaud,
elle ne dépasse pas 20°. Nous sommes ainsi bien éloignés
des températures de 35° au-dessus de 0 des régions tropicales
et de celles de 50° au-dessous de 0 du nord de la Sibérie. Notre
climat, n'étant ni trop chaud, ni trop froid, est un climat tempéré.
Cela se conçoit d'ailleurs facilement, puisque la Lorraine est située
à peu près à égale distance des zones glacées
du pôle et des régions brûlantes de l'équateur.
La courbe apparait formée de zigzags capricieux ; ses nombreuses
échancrures correspondent à des refroidissements et les dents
qui la hérissent marquent des réchauffements. C'est que notre
climat est le plus continental de toute la France.
«En hiver, les coups de froid alternent avec les temlps doux. On assiste
au printemps à des retours offensifs de l'hiver. Les orages de l'été
sont précédés d'une chaleur excessive et suivis d'un refroidissement
notable. En automne, enfin, on jouit d'une prolongation de la belle saison».
Les dentelures sont plus prononcées dans la branche ascendante que dans
l'autre. C'est que les variations de température sont surtout énormes
dans la première moitié de l'année et en particulier au
printemps. On en a remarqué qui atteignaient parfois 25° du lever
du soleil à 3 heures de l'après-midi. Ce sont ces sautes brusques
de température qui font que notre climat est un des plus rudes de la
France.
Enfin, le nombre des mois chauds, de ceux dont la température dépasse
15°, n'est que de 3 ou 4, et ce nombre peut même tomber à 0
comme en 1860. Aussi notre climat est un des plus froids de la France.
La pluie
et le beau temps en Lorraine (En partie, d'après l'étude de M.
MILLOT : Les Vents à Nancy. Bulletin de la Société des
Sciences, t. XII.) On remarque en Lorraine la haute prédomiminance des
vents marins ou tropicaux : sud, sud-ouest, ouest. Ils soufflent en toutes
saisons, mais surtout en été, puis en automne. Ils amènent
un temps humide ou pluvieux, et sont accompagnés d'une faible pression
barométrique.
Le vent du sud-ouest, le Vent, comme l'appellent simplement les gens du pays,
est par excellence le vent des tempêtes ou du mauvais temps. Chargé
des vapeurs de l'Océan, il ne rencontre jusqu'à son arrivée
en Lorraine que des hauteurs insuffisantes pour arrêter les nuages qu'il
entraîne Les collines de la Meuse et les montagnes des Vosges sont les
premières barrières qui l'arrêtent. Aussi, il pleut beaucoup
sur les côtes lorraines et davantage sur les hauts sommets des Vosges.
Après lui viennent, dans l'ordre de fréquence, les vents continentaux
ou polaires : nord, nord-est et est. Ils règnent, le plus souvent,
dans la seconde moitié de l'hiver, ou du printemps. Ils accompagnent
le beau temps et généralement une pression élevée.
Ce sont des vents secs, qui ont passé sur les terres du continent et
qui viennent parfois de très loin, de Russie et de Sibérie, par
les grandes plaines du Nord de l'Allemagne. Exception faite pour le vent du
Nord, la bise, qui est toujours froide, leur température se modifie avec
celle des terres qu'ils traversent, de sorte qu'ils sont chauds durant le jour
en été, froids en hiver, dangereux au point, de vue des gelées
printanières.
Les vents opposés de sud-ouest et de nord-est se partagent donc presque
exclusivement l'année en Lorraine et leur fréquence relative fait
les saisons sèches ou pluvieuses.
Le nord-ouest (l'Ardenne) et surtout le sud-est s'observent, en effet, beaucoup
moins souvent : ce sont des vents de passage et de transition qui durent
peu.
Cependant, l'Ardenne règne quelquefois au printemps, concurremment avec
la bise et le vent du nord-est (le hôle). Il a une intensité variable
et amène alors des giboulées de neige et de grésil alternant
ayec des éclaircies.
III - Les eaux
1. - La Moselle
La
Lorraine est un centre de dispersion des eaux. Elle en envoie à trois
mers : à la Mer du Nord par la Moselle et la Meuse ; à
la Manche par l'Ornain et la Saulx ; à la Méditerranée
par la Saône. La Moselle a une longueur de 500 kilomètres, dont
300 en Lorraine. Née dans les Vosges, près du col de Bussang,
à plus de 700 mètres d'altitude... elle descend rapidement à
Remiremont et à Épinal, où son cours se ralentit. Elle
contourne paresseusement la forêt de Haye à Pont-Saint-Vincent,
Toul, Liverdun, Frouard, Pompey, baigne Pont-à-Mousson, et quitte la
France à Pagny. Elle arrose ensuite Metz, Thionville, Trèves,
traverse en serpentant le massif rhénan et finit dans le Rhin à
Coblentz (= confluent).
Grâce à de nombreux travaux de canalisation, la Moselle est navigable
à partir de Pont-Saint-Vincent. Ses eaux claires coulent sur un lit de
cailloux roulés ; dans la plus belle et la plus industrielle des
vallées lorraines.
LECTURES
: Les transformations des cours d'eau lorrains
Il y a des millions d'années, la Moselle portait ses eaux à la
Meuse par l'étroit passage de Toul, où on retrouve la trace de
son lit et les graviers vosgiens qu'elle y déposa. Les deux rivières
formaient alors un fleuve puissant, dont les flots tumultueux creusèrent
la profonde vallée de la Meuse actuelle.
Sur le plateau de Haye coulait un affluent de la Meurthe. Comme la plupart des
cours d'eau, celui-ci recula insensiblement sa source vers l'amont. Quand sa
vallée eut rejoint celle de la Moselle, les eaux de cette rivière,
sollicitées par la pente, suivirent l'affiuent et allèrent à
la Meurthe, puis au Rhin.
Entre Toul et Commercy s'étend le val abandonné. Il ne s'incline
plus vers l'ouest comme jadis. Ses extrémités s'abaissèrent,
en même temps que la Meuse et la Moselle approfondissaient leur lit. Aujourd'hui,
la partie la plus élevée se trouve vers le centre. La plus basse
débouche dans la Moselle, parce que cette rivière creusa sa vallée
plus rapidement que ne le fit la Meuse. Ainsi s'explique la direction de l'Ingressin
qui suit le val abandonné au rebours de l'ancien cours.
Non seulement la Meuse perdit les eaux vosgiennes, mais elle subit encore d'autres
mutilations. La Seine lui déroba l'Aire. La Saône et le Madon lui
enlevèrent plusieurs tributaires de son cours supérieur. Et la
Moselle attira probablement quelques ruisseaux de la Woëvre.
Privée de la plus grande partie de ses affiuents la Meuse est donc une
rivière déchue. Son mince filet d'eau manque de force pour balayer
les alluvions qui encombrent son lit. Cependant ces alluvions empêchent
le peu d'eau que reçoit la rivière de se perdre dans les fissures
du terrain calcaire et de s'écouler rapidement vers la mer. Sans elles,
la Meuse serait souvent à sec.
La Moselle est autrement vaillante néanmoins, depuis la disparition des
glaciers vosgiens, elle a beaucoup perdu de sa puissance. Les matériaux
arrachés à son cours supérieur et déposés
plus bas ont adouci sa pente. Si ses eaux ont encore quelque impétuosité
dans la montagne, sur le plateau, elles se trainent indécises, somnolentes,
presque paresseuses.
Le régime de la Moselle :
La Moselle est formée de milliers de ruisselets qui descendent du versant
occidental des Vosges, depuis le col de la Schlucht jusqu'au col de Bussang,
où se trouve la maigre fontaine qu'on appelle sa source. La rivière,
au début, n'est qu'un petit ruisseau, mais elle se grossit vite de quantité
de torrents.
A Épinal, elle roule déjà 28 mètres cubes d'eau
par seconde, alors que la Meuse, à sa sortie de Lorraine, n'en draine
que 36 néanmoins, son débit est modeste. Elle verse au Rhin quarante
fois moins d'eau que le Rhône n'en donne à la Méditerranée,
quinze fois moins que la Garonne n'en fournit à l'Océan, six et
sept fois moins que la Loire et la Seine n'en portent à la mer.
La Moselle a un régime assez régulier. Si elle baisse et s'appauvrit
pendant l'été, son indigence n'est jamais extrême, grâce
aux sources, aux marécages et aux lacs vosgiens qui partagent avec elle
la provision d'eau faite en hiver.
Elle s'enfle après les pluies d'automne et déborde quelquefois
au moment de la fonte des neiges. Mais ses crues sont très rares et peu
dangereuses. Le régime de la rivière est régularisé
par les belles forêts des Vosges. Les pluies s'y attardent sur les feuilles,
tombent en gouttelettes sur le tapis élastique des sous-bois, s'y arrêtent,
y filtrent. Et au lieu de donner naissance à des torrents redoutables
qui détruisent, elles deviennent des rivières délicieuses
qui prodiguent la fertilité, le mouvement et la vie.
2. - Les affluents de la Moselle
La
plupart des affiuents de la Moselle viennent des Vosges. La Moselotte et la
Vologne, qui sert de déversoir aux lacs de Retournemer, de Longemer et
de Gérardmer, sont exclusivement montagnardes. Leurs eaux rapides et
claires coulent dans des vallées étroites, où elles forment
de belles cascades.
Comme la Sarre, qui n'est plus française, la Meurthe achève son
cours sur le plateau. Elle descend rapidement du col de la Schlucht par Fraize,
Saint-Dié et Raon-l'Étape. Elle traverse lentement Baccarat, frôle
Lunéville, Dombasle, Saint-Nicolas, Nancy, et vient doubler la Moselle
à Frouard. Elle lui apporte les eaux du Rabodeau, ruisseau de Senones
et de Moyenmoutier ; de la Plaine, cours d'eau de la vallée de Celles ;
de la Vezouse, qui passe à Lunéville ; de la Mortagne, sur
laquelle se trouve Rambervillers, et du Sanon, la rivière du sel.
Les affiuents qui viennent du plateau trainent leurs eaux ternes dans un lit
sinueux souvent encombré d'herbes. Les principaux sont le Madon, qui
passe à Mirecourt ; le Rupt de Mad, qui baigne Thiaucourt ;
la Seille, qui arrose Dieuze, et l'Orne, qui draine les eaux des étangs
de la Woëvre (Le sol argileux de la Woëvre (prononcez Ouàvre)
retient l'eau. On y compte 45 étangs. Plusieurs d'entre eux dépassent
en superllcie les plus grands lacs des Vosges. Celui de la Chaussée,
par exemple, a une surface triple de celle du lac de Gérardmer.)
LECTURES
: L'eau dans les Vosges
Les sources abondent dans les Vosges. On les entend murmurer à chaque
pas. Elles forment de petits ruisselets, qui dévalent bruyamment au bas
de la vallée. Ces sources portent parfois le nom de gouttes, que l'on
retrouve dans la désinence de quelques hameaux : Gemaingoutte, Parfongoutte,
etc.
L'écoulement des eaux n'est pas toujours assuré. Il arrive que
des ruisselets s'arrêtent et s'emmagasinent dans des réservoirs
marécageux et tourbeux, à qui on donne le nom de faings ou de
feignes. Celles-ci se remplissent d'eau lors de la fonte des neiges et assurent
pour l'été la provision régulière des ruisseaux
ou rupts.
Le sol spongieux des feignes ne se distingue pas à l'œil. Au cours
d'une promenade à travers la forêt, on arrive dans une clairière
tapissée d'herbe courte ; on s'avance sans songer au piège,
et le pied s'enfonce jusqu'à la cheville. Même en été,
au moment des fortes chaleurs, par une température de 25°, ces clairières
demeurent dangereuses, tant la forêt avoisinante leur envoie d'abondantes
provisions d'eau. Le mot de faing, comme celui de goutte, a servi à la
formation des noms de villages : Plainfaing, Domfaing, etc.
Lorsque
les flaques d'eau se revèlent nettement au lieu de se dissimuler sous
la mousse, elles portent le nom de mers ou de mortes, appellations locales des
lacs vosgiens. Ces lacs sont très nombreux et de dimensions variées.
Il en est trois qui sont très connus, parce qu'ils se trouvent situés
sur la route de Gérardmer à Colmar, au pied du col de la Schlucht,
que visitent chaque année tant d'étrangers : ce sont les
lacs de Retournemer, de Longemer et de Gérardmer.
Importance
de la Moselle en Lorraine
La Moselle est la plus longue, la plus poétique et la plus généreuse
des rivières lorraines. Tandis que la Meuse coule resserrée dans
un étroit sillon de collines, la Moselle s'étale sur le pays.
Elle reçoit tous les torrents du versant occidental des Vosges, et presque
tous les gros ruisseaux du plateau. Avec les lacs de Retournemer, de Longemer,
de Gérardmer, avec la Moselotte et la Vologne, elle jouit d'une renommée
universelle.
Ses eaux poissonneuses, sa vallée si divertissement belle, attirent,
les jours de fête et de vacances ; une foule exubérante de
pêcheurs et d'oisifs.
Dans sa course à travers notre pays, la charmante rivière se prodigue
de cent façons différentes. A quelques kilomètres de sa
source déjà elle travaille. Elle court d'usine en usine, faisant
de la toile, du papier, de la farine, fabriquant chaque année des millions
de planches et des millions de mètres de fil. Ses eaux montent avec la
sève dans les rameaux des arbres et dans l'herbe des prairies. Ses alluvions
nourrissent d'opulentes récoltes et de gras pâturages. De puissantes
dragues arrachent à son lit les galets et le sable fin. A Épinal,
à Messein près de Pont-Saint-Vincent et à Toul, d'énormes
turbines lui enlèvent chaque jour plus de 200.000 mètres cubes
d'eau pour les éclusées de nos canaux et pour l'alimentation de
la ville de Nancy.
Enfin la Moselle joue un rôle important dans le commerce lorrain. Reliée
à la Seine, au Rhin, à l'Escaut, à la Saône, elle
est sillonnée par de nombreux bateaux. La partie la plus animée
de son cours est celle qui entoure le centre industriel de Nancy. Là
se pressent les usines, les canaux et les voies ferrées ; des trains
nombreux passent, filant à toute vapeur ; des chalands glissent
au ras de l'eau comme des bêtes monstrueuses ; des fonderies emplissent
la vallée de de leur tapage assourdissant.
3.
- La Meuse
La Meuse (950 km, dont 450 en France) nait entre les Faucilles et le plateau
de Langres, à 409 mètres d'altitude. Son cours lent et sinueux
arrose Neufchâteau, Domremy, Vaucouleurs, Commercy, Saint-Mihiel, Verdun,
Sedan, et pénètre dans le massif de l'Ardenne en faisant de nombreuses
boucles. En Belgique elle traverse une région noire de houille, puis
se jette dans la mer du Nord en s'unissant avec le Rhin.
Le seul affluent important qu'elle reçoit en France est la Chiers, rivière
de Longwy. Le fleuve n'est pas navigable en Lorraine, mais il forme un fossé
important pour la défense du bassin de Paris. Au sud-ouest, la Lorraine
envoie ses eaux à la Marne par la Saulx et son affluent l'Ornain qui
passe à Bar-le-Duc.
LECTURES
: La Meuse
En Lorraine, la Meuse ne reçoit point d'affluents dignes d'être
cités. A part le Mouzon et le Vair, il ne lui vient que des ruisseaux
sans importance. Ses deux grands tributaires lui arrivent en Champagne (Chiers)
et en Belgique (Sambre). Chez nous. la Meuse « fait l'effet d'une rivière
déchue. Elle coule ou plutôt se traîne à travers ses
prairies, où pendant les sécheresses d'été on la
cherche presque. Elle laisse se détacher d'elle des bras sinueux qui
languissent, s'endorment en petits bassins envahis par les herbes, se séparent
du chenal principal. L'hiver pourtant, la vallée des prairies est parlois
sous l'eau. Aussi, est-ce au pied des côtes, sur les versants enrichis
par les éboulis calcaires, que courent les routes, naissent les sources,
s'échellonnent les villages. Des gués assez nombreux relient les
deux rives, de sorte que le même village a souvent ses prairies d'un côté
et de l'autre. »
A travers l'âpre plateau de l'Ardenne, la. rivière s'est creusé
un lit tortueux et profond. Hors de France, elle devient la Mouse des Belges,
la Maas des Hollandais ; elle s'unit à un bras du Rhin et gagne
avec lui la mer du Nord.
Autrefois la vallée de la Meuse était la route la plus importante
entre les pays de la Saône et ceux de l'Escaut, entre la Bourgogne et
les Flandres. Si Charles le Téméraire avait réussi à
conquérir le duché de Lorraine, elle y serait devenue l'axe de
son royaume, le trait d'union entre ses Etats du Sud et ceux du Nord. Aujourd'hui
le rôle économique de la Meuse est bien effacé. Le voisinage
de la Moselle et de son riche bassin minier a arrêté le développement
industriel de cette rivière. Le chemin de fer et le canal qui la côtoient
n'ont qu'une importance secondaire. La plus grande partie du trafic pour le
transport des minerais de fer, des fontes et des charbons, emprunte la ligne
de Mézières, Longuyon, Conflans, Nancy, Epinal, Belfort. Ici,
comme ailleurs, l'usine a exercé sa puissante attraction et détourné
à son profit les courants naturels. Mais la Meuse est demeurée
notre grand fleuve stratégique. De puissantes forteresses couronnent
ses hauteurs. Elle baigne les murs d'importantes villes de garnison : Commercy,
Saint-Mihiel, Verdun, en Lorraine ; Sedan, Mézières, Givet,
en Champagne, sont des cités où domine l'élément
militaire, et le fossé de la Meuse est aujourd'hui notre frontière
véritable, notre première ligne de défense du côté
de l'Est.
Les
crues de la Meuse
La Meuse ne roule point d'eau en été ou si peu ! Mais viennent
les pluies et les neiges de la saison froide ou les brusques averses de l'été,
elle devient un torrent redoutable. Elle n'écoule plus, comme en juillet,
3 mètres cubes d'eau à la seconde, mais 200, 400 et parfois même
700. La vallée est alors complètement inondée. Des flots
jaunes couvrent les prairies riveraines de 1 mètre à 1m50. A cause
de la lenteur du dégorgement, l'eau met une semaine et quelquefois plus
à s'écouler.
Les riverains profitent et souffrent de ces crues. Les crues d'hiver sont régulières,
prévues et souhaitées ; elles laissent derrière elles
un limon fertilisant et tuent les animaux et les insectes nuisibles. Les crues
d'été, au contraire, sont inattendues et redoutées :
elles dévastent 20.000 hectares de prés, entraînent les
fourrages où les salissent sous une boue fétide d'où s'exhalent
des odeurs nauséabondes (Cf. AUERBACH. Le Plateau lorrain.).
Conclusion
Un plateau dominé à l'est par des montagnes peu élevées
et sillonné à l'ouest par de longues rangées de côtes ;
toutes sortes de terrains, depuis les roches anciennes des Vosges jussqu'aux
alluvions récentes des vallées ; un climat capricieux avec
des températures extrêmes et des pluies fréquentes ;
des rivières vives, précipitées, folâtres dans ]a
montagne, et calmes, sommeillantes, indécises sur le plateau, telles
sont les caractéristiques du milieu ou nous vivons. Nous allons voir
comment ce milieu physique agit sur les plantes et sur les hommes, et quel parti
ceux-ci ont su tirer des ressources qu'il leur offrait.
RESUMÉS
I.- Le Relief et le Climat
1.-
La Lorraine comprend 2 régions très différentes :
le Plateau qui a une altitude moyenne d'environ 300 mètres et les Vosges
dont les plus hauts sommets ne dépassent guère 1400 mètres
(Les Pyrénées atteignent 3400m au Néthou el les Alpes 4800m
au mont Blanc.).
2.- A l'est de la Moselle, le PLATEAU est à peu près uni ;
à l'ouest il est accidenté par les hauteurs de Moselle et celles
de Meuse.
3.- Depuis 1870-71, les VOSGES ne sont plus entièrement françaises.
Leurs principaux sommets sont : le Ballon d'Alsace, le Ballon de Guebwiller,
le Hohneck, le Donon ; leurs Cols les plus fréquentés ceux
de Bussang, de la Schlucht et de Saverne.
4.- Le CLIMAT lorraiin est le plus continental de la France. Il est froid en
hiver et chaud en été. En toutes saisons il est très changeant
et assez pluvieux, surtout dans les Vosges.
1.-
la MOSELLE, la grande rivière lorraine, passe à Remiremont, Épinal,
Toul, Frouard, Pont-à-Mousson, Metz et finit à Coblentz dans le
Rhin. Des Vosges elle reçoit 2 ruisseau très connus : la
Moselotte et la Vologne, et 2 longues rivières : la Meurthe et la
Sarre. Du Plateau lui viennent : le Madon, le Rupt-de-Mad, la Seille et
l'Orne.
2.- la MEURTHE passe à Saint-Dié, Raon-l'Étape, Baccarat,
frôle Lunéville et Nancy. Ses affluents sont le Rabodeau, la Plaine,
la Vezouse, la Mortagne et le Sanon.
3.- la MEUSE coule étroite, dans une vallée étroite ! à
Neufchâteau, Commercy, Verdun, Sedan. Elle reçoit en France la
Chiers rivière de Longwy.
4.- Au sud-ouest de la lorraine, l'ORNAIN passe à Bar-le-Duc et porte
ses eaux à la Saulx qui est un affluent de la Marne.
LES RESSOURCES, LEUR EXPLOITATION
I - Ressources
agricoles
1. - Les forêts et les prairies naturelles
La
Lorraine est la première région forestière de la France.
Les forêts (1/3 du territoire) s'y étendent un peu partout, mais
ce qui influe le plus nettement sur leur répartition, c'est le relief.
Elles couvrent particulièrement les hauteurs infertiles où elles
forment quatre grandes lignes presque ininterrompues : celle de l'Argonne
et du Barrois ; celle des côtes de Meuse ; celle des côtes
de Moselle avec la forêt de Haye au centre ; enfin la grande forêt
vosgienne, continuée par celle des Faucilles.
Sur les hauts sommets des Vosges, d'où le climat excessif a chassé
les arbres, les pâturages appelés chaumes succèdent aux
futaies. Dans les bas-fonds, le long des rivières et des ruisseaux, l'humidité
abondante a permis à l'homme de créer de belles prairies qu'il
irrigue avec soin. Les plus productives se trouvent dans les vallées
des Vosges et sur les rives de la Meuse.
LECTURES
: Les bois Lorrains : Souvenirs qu'ils évoquent
En Lorraine, rien n'est beau comme les forêts. Leur infinie variété
d'aspect et, à chaque printemps, leur fraiche et éternelle jeunesse,
voilà la joie de notre terre.
Notre climat humide leur donne des arbres vigoureux et puissants. Et comme les
Lorrains, plus sages que les habitants des Alpes, des Pyrénées,
du Massif Central, les aménagent et les exploitent sans les détruire,
elles comptent parmi les plus belles forêts de la France.
Jadis, elles couvraient toute la Lorraine, des Vosges à l'Argonne, de
l'Ardenne au Plateau de Langres. Nos premiers aïeux y vécurent au
milieu des lianes, des reptiles et des bêtes féroces. Charlemagne
y chassa le bison, l'auroch et le cerf gigantesque. Jeanne d'Arc grandit et
rêva dans les bois de Domremy. A travers la forét d 'Argonne, Drouet
chevaucha rapidement pour gagner Varennes, avant Louis XVI : les lorrains
arrêtèrent le monarque qui fut réconduit à Paris
sous l'escorte de tout un peuple.
Non seulement les forêts servirent de refuge à pos aïeux,
obligés de fuir devant les hordes barbares du moyen âge, les troupes
de Louis XIII, les Suédois pilleurs et ravageurs..., mais en 1792, 1814,
1815, 1870 et 1871, elles devinrent le rendez-vous des partisans qui harcelèrent
l'ennemi et lui livrèrent parfois de singlantes batailles. Aujourd'hui
encore elles opposeraient à l'Allemagne une barrière redoutable.
Utilité
des foréts
Les forêts sont une des richesses de notre région. Nous leur devons
en partie notre climat salubre, nos pluies fréquentes, nos sources vives,
nos cours d'eau réguliers, nos vallées fécondes et nos
prairies verdoyantes.
Sans elles que deviendrait notre relief ? Les rafales s'abattraient torrentielles
sur les hauteurs, entraîneraient la terre arable des versents, mettraient
à nu la roche stérile ; les sources tariraient, les rivières
n'auraient plus qu'une orageuse existence. Ce serait la ruine de nos belles
Vosges, de nos vallées fécondes, de nos cours d'eau bienfaisants
et des nombreuses industries qui s'échelonnent sur leurs bords. Mais
les forêts couvrent encore le tiers de la Lorraine. Leurs racines fixent
le sol et l'empêchent de glisser dans les vallées ; leurs
frondaisons tamisent la pluie et ralentissent la fusion des neiges ; le
tapis élastique des sous.bois absorbe l'eau et la divise en sources pures.
Et au lieu de se gonfler démesurément après chaque orage,
nos rivières jouissent d'un heureux équilibre. Elles ne culbutent
pas de ponts, n'emportent pas de hameaux, ne détruisent point de villes
comme la Loire, la Garonne et le moindre torrent des régions dénudées.
Aimons donc les bois qui sont nos bienfaiteurs, nos protecteurs, nos amis.
- Un peuple sans forêt est un peuple qui meurt
- C'est pourquoi, tous ici, lorsqu'un arbre succombe
- Jurons d'en replanter un autre sur sa tombe !
L'Exploitation des Hautes-Chaumes
Chaque
année, vers la saint Urbaîn - le 25 mai - rarement plus tôt,
une tribu de pasteurs, les marcaires, quittant les hautes vallées de
Lorraine et d'Alsace, se met en marche avec de nombreux troupeaux pour les régions
solitaires des Hautes-Chaumes.
Là, ces hommes prennent possession de modestes chalets. Vivant presque
exclusivement de laitage et de pommes de terre, ils partagent leur temps entre
la surveillance du bétail de choix confié à leurs soins
et la fabrication des fromages (Gérômé). Tout le jour, parmi
les plantes aromatiques qui communiquent au lait leur parfum, les vaches en
liberté errent ,sur la montagne.
La nuit, c'est souvent en plein air, sur ces mêmes herbages, qu'elles
reposent. Quatre mois de ce régime, et déjà il faut songer
au retour. Voici les brumes, le froid. La saint Michel - 29 septembre - marque
d'ordinaire la date du départ. Pour le commencement d'octobre, la plupart
des chaumes sont désertes. A la chanson du gardien, au sonore mugissement
des vaches, au gai tintement des clochettes, succède un morne silence
! Les forêts isoleront bientôt du reste du monde les pâturages
couverts de leur blanc linceul.
(PIERRE Boyé. Les Hautes,-Chaumes des Vosges, Berger-Levrault et
Cie, édit.).
2. - Les champs lorrains : les récoltes principales
Entrecoupés
de bois et de prairies, les champs lorrains occupent la moitié du territoire.
Leurs récoltes annuelles ont une valeur d'environ 250 millions de francs.
Les céréales sont la culture dominante. Le blé réussit
dans les « terres fortes » du Plateau ; le seigle sur les terrains
pauvres des versants vosgiens et l'avoine un peu partout.
Grâce à la fréquence des pluies les fourrages artificiels
et les betteraves fourragères donnent des produits abondants qui favorisent
l'élevage. La pomme de terre se récolte dans toute la Lorraine
mais surtout dans les terres sablonneuses des Vosges où elle alimente
une centaine de féculeries (France 200 seulement).
LECTURES
: La poésie des Champs Lorrains
Voici la Lorraine et son ciel, le grand ciel tourmenté de novembre, la
vaste plaine avec ses bosselures et cent villages pleins de méfiance.
0 mon pays, ils disent que tes formes sont mesquines ! Je te connais chargé
de poésie. Devant ces terres magnifiquement peignées des sillons
de la charrue, devant cette multitude de petits champs bombés comme des
cuirasses, je prononce pieusement ces mots : « Salut, terre féconde,
mère des hommes ! ».
La terre lorraine est infiniment morcelée. Ses parcelles composent une
multitude de dessins géométriques. Tantôt étendus
côte à côte, tantôt placés en étoile,
ce sont une série de petits tapis de tous les verts, de tous les roux,
plus longs que larges : des tapis de prière. Humble prière
que chaque famille murmure depuis des siècles : « Donnez-nous aujourd'hui
notre pain quotidien ».
(D'après MAURICE BARRÈS. Le 2 Novembre en Lorraine).
La
lutte du Lorrain contre la terre
La Gloire du Lorrain est d'avoir tiré de sa terre plus qu'elle ne promettait.
Cette terre n'était point faite pour fournir les fruits à qui
ne les lui arrachait pas. Il a fallu défricher pendant des siècles,
et, après avoir défriché, désempierrer, car les
Vosges avaient semé de leurs cailloux aux époques lointaines,
les champs de la future Lorraine. Et puis, cette terre, difficile à cultiver
en général, résistait au soc. N'est-il point caractéristique
que ce soit un Lorrain qui ait découvert la charrue moderne ? ... Mais
avant que MATHIEU DE DOMBASLE lui eut mis dans les mains l'instrument précieux,
le paysan avait vaincu la terre ; il en était fier : «
Quand le Xaintois et le Vermois sont emblavés, la Lorraine ne risque
point de mourir de faim ». Traduisez : « Nous n'avons besoin
de personne. Nous faisons tout seuls notre pain, notre vin et notre bière
».
La lutte contre la terre, devenue avec grand peine nourricière, a porté
nos cultivateurs à écouter les enseignements qui leur pouvaient
venir en aide. La ferme de Roville fut ainsi, pendant vingt ans le siège
de la Providence pour les hommes de la terre lorraine : Mathieu de Dombasle
y prodiguait les expériences et les conseils qu'elle lui inspirait. Point
de région où fermes modèles, stations agronomiques, pépinières,
écoles d'agriculture, syndicats agricoles aient rencontré un succès
plus prompt et plus complet.
(LOUIS MADELIN, Croquis lorrains, Berger-Levrault et Cie, éditeurs).
3. - Les champs lorrains : les récoltes secondaires
Peu
de pays présentent une aussi grande variété de cultures
que la Lorraine.
Le vignoble s'étage sur les versants ensoleillés des Côtes
qui bordent l'Ornain, la Meuse, la Moselle, le Madon et le Rupt de Mad. Il produit
des vins légers et transparents.
Les légumes se récoltent surtout à proximité des
villes et des centres industriels ; les fruits aux environs des villages
et sur les routes veuves de peupliers.
Meurthe-et-Moselle se place au troisième rang des départements
français pour la production du houblon qu'utilisent 25 grandes brasseries.
Les bières de Tantonville, Maxéville, Champigneulles, Nancy, Bar-le-Duc,
Vittel..., se consomment dans la plupart des grandes villes de la France.
Le tabac, cultivé en Meurthe-et-Moselle et un peu dans le département
des Vosges, est utilisé par l'importante manufacture nationale de Nancy.
L'osier, abondant dans l'arrondissement de Lunéville et sur quelques
points de la vallée de la Meuse, est travaillé l'hiver par un
millier d'ouvriers agricoles.
LECTURES
: Richesse agricole de la Lorraine
La Lorraine ne tient le premier rang dans aucune production végétale,
mais ce qui la caractérise, c'est l'abondante variété de
ses cultures : céréales, fourrages, tubercules, racines,
légumes, fruits, vigne, houblon, tabac y poussent et y donnent de beaux
produits. Ah ! la Lorraine a de riches moissons qui manquent à la Bretagne
et à la Champagne ; de verdoyantes prairies que n'ont point le Languedoc
et la Provence ; de beaux vignobles qu'ignorent les plaines fécondes
du Nord et de la Normandie ; de remarquables champs de tabac et de houblon
que ne connaissent point le Plateau Central et la vallée de la Loire.
Notre bonne terre qui remplit à la fois le grenier, le fruitier et la
cave, peut être considérée comme une terre complète
et, à ce point de vue, notre province est une des plus favorisées
de la France. Sans doute, la Lorraine n'a point les trésors de fertilité
de l'Alsace ou de la Beauce. Son sol, souvent difficile à travailler,
ne donne point facilement de fruits. Mais pourvu que des attelages robustes
en déchirent les flants et qu'un le soigne avec intelligence et amour,
il est reconnaissant. Le rendement à l'hectare de nos terres lorraines
est supérieur à celui de beaucoup de provinces françaises,
et il n'est pas rare de voir onduler dans l'arrondissement de Nancy quelques-uns
des plus beaux champs de blé de la France.
Friandises
lorraines
Ayant arraché au sol ingrat fruits et blé, vin et bière,
le Lorrain a appliqué une partie de son idéalisme à être
gourmand. Il est remarquable que la plupart de nos villes soient renommées
pour quelque friandise : Confitures de Bar, dragées de Verdun, madeleines
de Commercy, macarons de Nancy, nônnettes-chanoinesses d'Épinal,
constitueraient autour des pyramides de mirabelles de Gripport et de cerises
d'Ancerville un dessert bien succulent. Nous gardons pour la quiche lorraine,
galette auxœufs, un goût que d'autres galettes bretonnes ou provençales
ne nous ont point enlevé ; elle inaugure fort bien un repas, étant
légère et comme mousseuse. Le saucisson de Lorraine, que connaissent
les charcuteries parisiennes, s'arrose bien de bière de Maxéville
ou de Tantonville. Le pineau (vin jadis renommé) frais de Bar-le-Duc
est délicieux, lorsque nous venons de manger une belle truite saumonée,
à la chair rose et tendre, de l'Ornain ou de la Saulx, ou un buisson
d'écrevisses de la Meuse. Nos rivières rapides de la Saulx à
la Vologne sont pleines de poissons excellents ; nos nombreuses forêts
remplies de gibier.
Gérardmer fabrique un fromage que plagient des provinces. Il est même
effrayant de penser que de ce produit savoureux on fabrique huit cent quatre-vingt
cinq mille kilogrammes annuels.. Les connaisseurs affirment que nos champignons
sont de premier ordre et les légumes de la banlieue de Lunéville,
que les halles de Paris nous enlèvent d'ailleurs, jouissent d'une saine
popularité.
(LOUIS MADELIN, Croquis-lorrains, Berger-Levrault et CIe, éditeurs).
II - Ressources industrielles
1. - La région de la houille blanche
La
Lorraine est le pays de France où les rivières travaillent le
plus. Dans les Vosges, leurs eaux vives actionnent quantité de filatures,
de tissages, de blanchisseries, de papeteries, de moulins et de féculeries.
Les filatures prédominent ; elles font de notre province la fileuse
de coton la plus active. Leurs principaux centres sont : Le Thillot et
Remiremont sur la Moselle ; Cornimont et Saulxures sur la Moselotte ;
Gérardmer sur la Vologne ; Plainfaing, Saint-Dié et Lunéville
sur la Meurthe ; Senones et Moyenmoutier sur le Rabodeau.
Les papeteries sont au nombre d'une trentaine. La plupart se sont établies
au voisinage de la montagne riche en bois et en chutes d'eau. Le Souche, hameau
d'Anould, Étival-Claire-fontaine, Les Châtelles près de
Raon-l'Étape, La Neuveville-les-Raon, etc., ont des usines qui comptent
parmi les plus importantes de la France. Enfin, l'exploitation des forêts
a également donné naissance à un grand nombre de scieries.
On en compte plus de 250 disséminées sur tous les torrents vosgiens,
dont une trentaine rien qu'à Gérardmer.
LECTURES
: Le développement prodigieux de l'Industrie dans les Vosges
Dans les Vosges, la vie industrielle est née des besoins élémentaires
de l'existence. A mesure que la population augmentait, elle dut, pour vivre,
chercher des ressources dans la forêt immense et dans les eaux courantes.
On vendit des arbres à la plaine et, bientôt, la Meurthe vit s'établir
un flottage important vers les riches campagnes de Metz. Des scieries, des moulins
à papier profitèrent de la force des rivières, des verriers
utilisèrent les sables des grès ; des tisserands filèrent
le chanvre et le lin.
Ces industries
demeurèrent humbles jusqu'au milieu du XIX° siècle, époque
de la création des chemins de fer. C'est seulement lorsque les Vosges
purent facilement entrer en relations commerciales avec les autres parties de
la France, que de grandes usines s'élevèrent sur les cours d'eau.
Elles se multiplièrent avec une prodigieuse rapidité, après
la terrible guerre de 1870. La plupart des Alsaciens qui vinrent en France chercher
la Patrie, s'établirent en Lorraine. En quelques années, filatures,
tissages, blanchisseries s'échelonnèrent le long des torrents.
Aujourd'hui, toutes les rivières : Moselle, Moselotte, Vologne,
Meurthe, Rabodeau, Plaine, etc., ne sont que des rues d'usines. Elles filent,
tissent, scient, accomplissent chaque jour un travail d'Hercule.
Cependant, les eaux vives ne suffisant plus à mouvoir les multiples machines
des industries modernes, il a fallu leur adjoindre la force de la vapeur. Sur
tout leur parcours se dressent de hautes cheminées où l'on consomme
la "houille noire", qui vient en aide à la "houille blanche".
l'industrie
du Vêtement en lorraine
Les 70 filatures des Vosges comptent près de 3 millions de broches (environ
la moitié de la France). Or, une bobine peut faire à la minute
7.000 à 8.000 tours de broche. C'est donc un travail prodigieux que fournissent,
sur leur pivots nos modernes fileuses... Mais, où sont les rouets d'antan?
A peine faisaient-ils sous le pied le plus agile 60 tours à la minute.
Et les tissages, qui sont une trentaine, ont triplé leur chiffre de 1873;
ils renferment près de 50.000 métiers. Des vallées entières
ne sont qu'une série de manufactures.
La blanchisserie et la teinturerie de Thaon traitent chaque année plus
d'un million sept cent mille pièces de tissus. Quant à l'indiennerie
d'Épinal, elle est de beaucoup la manufacture la plus importante qui
soit en France pour les tissus imprimés.
Gérardmer a des manufactures considérables de toiles des Vosges;
Saint-Dié, Le Thillot, Bar-le-Duc..., des fabriques de lainages; Vaucouleurs,
trois maisons de gilets de flanelle. Mirecourt est demeuré le centre
de la dentelle lorraine. Enfin Nancy, avec ses seize grandes manufactures de
chaussures, est l'un des marchés les plus forts de la chaussure française.
Chose plus curieuse, ce sont les huit chapelleries de notre région qui
détiennent le monopole de la fabrication des chapeaux tressés
en fibres exotiques; leur production quotldienne est de 25.000 articles, depuis
le vulgaire chapeau de paille jusqu'au superbe panama. Est-il téméraire
d'affirmer alors que la Lorraine est bien un centre complet pour l'industrie
du vêtement ? (D'après EUG. MARTIN, Revue Lorraine illustrée
1906. Tous les chiffres ont été mis au courant des plus récentes
statistiques).
. l'Industrie du Papier
'Depuis quelques années, la Lorraine est devenue l'un des producteurs
les plus actifs et 1 les plus féconds dans
L'industrie
du papier.
Certaines usines se bornent à façonner les pâtes mécaniques
ou chimiques; un plus grand nombre transforment les pâtes qu'elles produisent
ou qu'elles achètent en papiers de toute nature.
Le Souche livre quotidiennement 18.000 kilos de papier; Jeand'heurs, 10.000
à 11.000; Étival-Clairefontaine apprête, chaque jour, 1
million d'enveloppes, 50.000 cahiers d'écolier.